Un financement stable et prévisible est nécessaire pour faire face à la crise croissante d’accès aux services de soutien selon les organisations de première ligne
OTTAWA, le 24 Mai 2023 – Alors que les centres d’aide aux victimes d’agressions sexuelles et les autres prestataires de services aux survivant·e·s font face à des pressions croissantes et que les victimes luttent pour obtenir un soutien en temps opportun, les résultats préliminaires d’un sondage national illustrent les défis auxquels les organisations de première ligne sont confrontées, alors qu’elles tentent de répondre à la demande de services.
La situation est encore aggravée par la perte du financement d’urgence COVID pour les services de lutte contre la violence fondée sur le genre, incluant les centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel et les maisons d’hébergement pour femmes victimes de violence.
Ce sondage, le premier du genre, a été mené par l’Association canadienne pour mettre fin à la violence (EVA Canada) auprès de plus de 100 organisations de lutte contre la violence sexuelle (OVS).
Les réponses de centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, de lignes d’écoute pour les victimes de viol et d’autres prestataires de services ont exposé la difficulté de répondre à l’augmentation de la demande découlant de la pandémie et du mouvement #MeToo, qui a incité davantage de personnes à se manifester et à signaler les incidents de violence sexuelle.
Voici les principales conclusions de ce sondage historique:
- Quatre-vingt-trois pour cent des OVS ont fait état d’une augmentation ou d’un taux élevé de la demande de services d’aide aux victimes de violences sexuelles par rapport aux niveaux d’avant la pandémie.
- Soixante-seize pour cent des OVS ont signalé des temps d’attente accrus ou élevés, ce qui se traduit par des délais d’accès aux services encore plus longs qu’avant la COVID-19. Les temps d’attente les plus longs concernent le counseling individuel et de groupe, avec des délais allant de six mois à un an ou plus.
- La complexité croissante des facteurs qui aggravent l’impact de la violence sexuelle peut contribuer à ces augmentations, notamment le manque de logements abordables, le chômage, la mauvaise santé, la détérioration du bien-être mental et l’augmentation des dépendances.
Le sondage a également révélé que la COVID-19 avait eu un impact sur la santé du personnel et sur les capacités en ressources humaines des OVS:
- Quarante-six pour cent ont déclaré que leur personnel avait pris un congé médical pour des raisons liées à la pandémie, telles que le stress, l’épuisement professionnel et la maladie.
- Cinquante-quatre pour cent ont déclaré être confrontées à des difficultés accrues pour recruter et conserver du personnel qualifié.
- Près de 18% du personnel a pris une retraite anticipée ou quitté le marché du travail au cours de la COVID-19.
Soulignant l’impact des bas salaires et des traumatismes secondaires sur le personnel, une organisation a déclaré:
«Depuis la pandémie, il y a eu beaucoup de roulement dans le personnel de première ligne et les intervenantes. Le personnel quitte les postes au sein d’organismes caritatifs pour des emplois qui offrent un salaire plus élevé. En outre, le travail dans le domaine de la violence sexuelle présente un risque élevé de traumatisme vicariant. Beaucoup ont quitté leur poste pour un travail ‘moins stressant’ ou pour prendre du temps de repos.»
Bien que 83% des organisations interrogées aient déclaré avoir reçu un financement d’urgence, ce qui les a aidées à garder leurs portes ouvertes et à s’orienter vers la fourniture de services virtuels pendant la pandémie, elles ont également décrit le stress dû au manque chronique de ressources:
«En tant que centre local d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel, nous manquons cruellement de fonds et de ressources. Nous n’avons pas reçu d’augmentation permanente depuis des années, ni d’indexation au coût de la vie. Nous faisons tellement de choses avec si peu.»
«Nos équipes sont demeurées assez stables jusqu’à maintenant, mais nos enveloppes de financement provenant des bailleurs de fonds provinciaux n’ont pas suivi le rythme de la demande de services ou de l’augmentation des coûts. Nous sommes largement sous-payées par rapport à la complexité de notre travail.»
«Les résultats de ce sondage historique illustrent l’état actuel des services et des organisations de lutte contre la violence sexuelle au Canada, mettant en évidence des déficits de financement préexistants rendus encore plus urgents par le stress de la COVID-19», déclare Erin Whitmore, directrice générale de l’Association canadienne pour mettre fin à la violence.
Elle ajoute, «Les centres locaux d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel jouent un rôle clé dans la lutte contre la violence sexuelle, mais sans financement à long terme après la pandémie, ils ne peuvent pas atteindre les communautés mal desservies et répondre à la forte demande. C’est très préoccupant, car le financement d’urgence COVID prendra bientôt fin.»
«Plus important encore, nous avons besoin de ressources stables et continues au Canada pour faire avancer la prévention, et pas seulement la réponse après que la violence sexuelle se soit produite», conclut Mme Whitmore.
Le sondage a révélé d’importantes inégalités dans l’accès aux services spécialisés, en particulier pour les personnes vivant dans les territoires nordiques et zones rurales.
Il a également révélé que les modèles actuels de services de soutien ne sont pas toujours adaptés aux défis systémiques que vivent notamment les populations autochtones, noires et racisées,les nouveaux arrivants, les personnes transgenres, non-binaires et vivant avec un handicap.
Les longs temps d’attente compromettent les possibilités de traitement, car les personnes qui attendent longtemps risquent de ne plus être prêtes à bénéficier d’un soutien lorsque leur tour viendra enfin.
La violence sexuelle est un acte sexuel commis contre la volonté d’une autre personne. Il s’agit notamment des agressions et abus sexuels, du viol, du harcèlement sexuel, de la coercition sexuelle, de la traite des êtres humains à des fins sexuelles et des préjudices sexuels facilités par la technologie.
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L’Association canadienne pour mettre fin à la violence (EVA Canada) est une organisation nationale qui s’efforce d’amplifier la voix collective de celles et ceux qui croient qu’il est possible de mettre fin à la violence fondée sur le genre. Nous comptons parmi nos membres des réseaux provinciaux et territoriaux de centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel et d’autres organisations de lutte contre la violence fondée sur le genre de tout le pays.
Pour plus d’informations, veuillez contacter: media@endingviolencecanada.org
L’Association canadienne pour mettre fin à la violence reçoit l’appui financier de Femmes et Égalité des genres Canada.